Il faut chaud dans la voiture. J'aime les autoroutes la nuit, les villes endormies, le temps qui presse et je m’en fous d’un coup, la comédie qui s'arrête. J'aime le bruit des roues sur les bandes blanches, les rares lumières, le GPS pour veilleuse, compter les stations-essence, compter les kilomètres avant les stations-essence. Il faudra faire de l'essence. Ou alors attendre que le témoin s'affole. Tu t'endors. Je baisse le volume de la radio à quatre. Qui chante ça déjà ? On a dépassé Poitiers je pense. Je ne sais pas vraiment où nous sommes et les panneaux vont trop vite. Un endroit inconnu on avait dit. "Avec la mer !" avais-je insisté. Il fera jour en arrivant. On se fera le petit-déjeuner devant le vent et les vagues ; on prendra des tartines, du beurré salé, du café. J'ai faim. Le paquet de chips est trop loin. Les informations annoncent la mort de Clint Eastwood et je ralentis. Je repense à la scène finale de la route de Madison, le pick-up qui tourne à gauche et Meryl Streep au bord des larmes. J'achèterai les journaux en arrivant. Ils passeront de vieux films à la télé. La chambre d’hôtel aura un papier-peint à la con. Il fera froid. On demandera des couvertures.

Je ne sais toujours pas où l'on va quand on meurt mais je m'en fous maintenant car tu es là et on ne se sépare plus on a dit. Je n’ai plus peur. On sera heureux.

Je te regarde. Tu dors. Je te dis que je t'aime.